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Dans ces moments incertains où les puissances dominantes imposent leurs règles iniques qui malmènent la plupart de nos contemporainEs, les femmes, les enfants, les plus démuniEs, il y a encore bon nombre d'entre nous qui croient ou feignent de croire que la révolte les animerait toujours. Que leur sens de la révolte leur suffirait ! Qu'il leur suffirait de garder espoir, ou, pour le moins, que leur sens de la révolte suffirait à leurs yeux pour garder bonne conscience...

Pourquoi ils-elles se trompent, en toute objectivité. Huit parmi les quelques-unes de ces multiples questions qu'il nous faudrait se poser pour, selon l'expression de Sénèque, désapprendre à espérer, souvent en vain, pour mieux comprendre comment VOULOIR !

1. La révolte exprimée permet-elle d'atteindre les objectifs revendiqués ?

La seule mesure à se donner, c'est : « QUELS OBJECTIFS SONT ATTEINTS ? » – les nôtres ou bien les leurs ? Ceux des victimes ou bien ceux des oppresseurs ?

Impossible de se déclarer satisfaits tant que les objectifs sont autres que ce que l'on vise, surtout s'agissant de justice sociale.

À quoi sert donc de se déclarer du côté des opposants, des réfractaires, de la révolte, des « insoumisES », des désobéissantEs, des IndignéEs, ou des victimes, à quoi bon utiliser tout ce lexique auto-complaisant si l'on se laisse à ce point réduire à accepter l'inacceptable. Si, face à nos démarches de protestations, l'emportent encore et toujours des décisions iniques venues d'autorités indécidables (expulsions, taxations, répressions, incarcérations politiques, installations de Linky, etc.), est-il pertinent, voire décent d'imaginer que nous aurions fait ce que nous pouvions ? – quand il reste tellement à obtenir !...

2. Faut-il vraiment pavoiser face à la permanence de l'injustice ?

Qu'importe après tout le nombre éventuellement croissant de protestataires avec nous, est-ce vraiment si prometteur quand nous sommes touTEs obligéEs de subir des charges inacceptables (la CSG, les emplois sous-qualifiés, les taxations trois fois plus importantes que notre consommation, la course aux armements, le nucléaire, les délocalisations, les contrôles sécuritaires, l'état d'urgence, les secrets d'État...).

C'est vrai qu'on peut se trouver relaxé d'un procès-bâillon, et tant mieux, c'est un moindre mal, mais est-il juste d'avoir à subir trois années de procédures et des milliers d'euros de frais d'avocats quand les parties civiles multimilliardaires s'en tirent sans se faire condamner pour abus de droit ?

Inutile de se voiler la face, tant que les décisions ne seront pas des décisions justes, nous ne serons que les sujets, victimes ou témoins passifs d'oppressions, de situations intolérables.

3. Quelle est donc la vocation RÉELLE de cette (im)posture – se prétendre en révolte là où l'on est au contraire dans l'acceptation de fait, la soumission, le fatalisme, la sidération ?

À quoi sert de feindre une réussite, même partielle, de nos luttes quand la position des dominants reste une position de domination injuste ?...

Se réjouir d'avoir créé une monnaie complémentaire ?... Parce qu'on ne veut pas participer à la gabegie nationale et internationale. Très bien, okay. Seulement QUE FAIT-ON CONTRE CETTE GABEGIE QUI CONTINUE ? – C'est au-delà de nos faibles forces, répondent les partisans des monnaies locales qu'on entend sans doute un peu critiquer la prolifération des pesticides, des OGM ou des mines industrielles dans leurs régions, mais qui ne dénoncent pas beaucoup, et, en tout cas, sans guère de conviction, la FrançAfrique, le commerce des armes dont vit grassement notre pays depuis des siècles, le néo-colonialisme des multinationales, le lâchage des peuples frères comme les Palestiniens, Sahraouis, les Kurdes, les autochtones des pays indépendants ou encore sous tutelle, les Rroms... 

Un autre cas, tout aussi concret : la technocratie.

Parce qu'on a besoin d'énergie, on va se laisser installer un compteur communicant Linky. Aucune illusion à se faire : même en arborant des pancartes NON AU LINKY on se ment à soi-même si au bout du compte on supplie le poseur de compteur de poser malgré tout son *** de compteur. Raison garder : même les démarches judiciaires qui pourraient aboutir à la dépose du Linky, ultérieurement, seront des démarches non seulement coûteuses, mais, de plus, la dépose ne pourra jamais s'effectuer qu'à la charge de l'État, autant dire des contribuables ; pendant que le distributeur, lui, eh bien il restera quoi qu'il en soit gagnant sur toute la ligne.

4. - a) Se prétendre digne et debout quand on est en réalité humilié à genoux ?

Rien de pire que les parades, les effets d'annonce, les déclarations de matamore. Pure propagande, illusoire, qui ne trompe que ceux et celles qui veulent bien se laisser tromper.

Pourquoi ne pas tirer le constat de nos impuissances actuelles ?...

Ce n'est pas être radical ou extrémiste que d'admettre que face à des puissances aussi coercitives que celles qui règnent de nos jours dans le monde, on ne pourra accéder aux revendications les plus légitimes qu'avec des oppositions radicales et fermes, très tenues, intransigeantes, rigoureuses, intègres, GÉNÉRALISÉES ET NOMBREUSES contre les sociétés d'actionnaires, qu'il nous faut réussir à faire couler financièrement, ne serait-ce que par le boycott des plus importants, de Coca-Cola, de L'Oréal, de Nutella, d'essences, de cigarettes...

4. - b) Faut-il se contenter du feu de fumée qui fait écran aux horreurs du système qui écrase tous les malheureux dans le monde entier, y compris dans les pays prétendus avancés, préservés, privilégiés ?

Pourquoi laisser chacun, chacune à ses réponses individuelles ?... Toute cette glose révolutionnaire dont se gargarisent beaucoup de fatalistes aux allures et aux citations fracassantes veut faire diversion, sans doute, mais il faut se rendre à l'évidence : tant que nos mobilisations en resteront sans effets, même au local, et sans aucune passerelle entre les luttes, alors nous livrerons les plus faibles aux puissances dominantes.

Préserver les classes moyennes fragilisées ne suffira pas. Il faut AUSSI soutenir les luttes légitimes des défavoriséEs de nos sociétés.

Si nos objectifs visent à la justice (la liberté d'expression, de circulation et d'installation des personnes sans aucune condition d'origine, de genre ou d'âge, sur la seule considération d'être néE humainE), et, qu'en réponse à chacune de nos démarches, toutes nos administrations, nos polices, nos tribunaux n'accordent jamais ces droits qu'à certaines personnes et suppriment systématiquement leurs droits les plus légitimes aux plus démuniEs, aux étrangerEs, aux mineurEs, aux Roms, peut-on se contenter de protester ? Peut-on se satisfaire d'être nombreux, nombreuses à protester ?

5. La protestation serait-elle un objectif en soi ?

Si la démarche protestataire est une étape ou un moyen pour atteindre l'objectif, rien à dire, nous sommes bien là dans un rapport de forces que nous devons faire évoluer en faveur des droits pour toutes et tous.

Mais...

Quand la démarche protestataire reste nulle d'effets, que ses conséquences ne passent jamais dans l'application des décisions réellement JUSTES, que ça se cantonne à une mobilisation qui compte ses participantEs, alors, il est hélas à craindre que la protestation soit une triste balance entre amateurisme et professionnalisme. En tout cas, dans le premier cas, c'est une douce plaisanterie sans suite effective, sans passage dans les actes ; et, dans le second cas, c'est une récupération qui instrumentalise les colères pour mieux les canaliser, les anesthésier et les réduire à néant, temporiser les ondes de chocs, cautionner une prétendue liberté d'opinion qui se contente d'exister sans rien obtenir de tangible en matière de justice vraie, la seule qui compte vraiment : la reconnaissance de la pertinence des objections et la mise en application des fonctionnements dignes pour les personnes concernées.

6. - a) Ignorer les effet pervers des protestations de pure forme ?

Non seulement une protestation peut s'avérer nulle dans ses résultats immédiats, mais elle peut même être totalement contreproductive vis-à-vis des administrations auxquelles l'on aurait voulu s'adresser (préfecture, centre d'accueil, distributeur d'énergie, police, personnel communal...). Ou contre leurs entreprises-écran, les sous-traitants, qui nous maltraitent, au fond, faut le reconnaître.

Surtout quand la protestation est de pure forme, sans réelle volonté d'aboutir, juste pour le fun, une série de selfies avec des pancartes aussi incantatoires que le fameux NO PASARAN des républicains espagnols obligés de laisser passer les nationalistes. 

Surtout, aussi, quand la pseudo protestation se veut bon-enfant, ludique (manifestive, disent même quelques irréductibles Gaulois activistes). Surtout, enfin, quand cette protestation folklorique donne aux zéléEs “employéEs” (1) en face l'occasion d'imposer l'inacceptable, notamment avec des arguments du lampiste tels que : « Moi, je ne fais qu'appliquer les ordres, laissez-moi donc faire mon travail, sinon c'est le chômage pour moi ». 

Aucune illusion à se faire, la protestation qui n'aboutit pas devient une caution pour le compte rendu du Zélé. TechnicienNE ? Sans doute. ExpertE, spécialiste, okay. Mais leur moteur existentiel est le même que celui des geôliers, des bourreaux, des tortionnaires, des mercenaires : efficace et sans état d'âme. Le Zélé (ou la Zélée) pourra ensuite recevoir de l'avancement, des titres honorifiques, des articles dithyrambiques, des louanges intéressées, des missions de confiance pour imposer ce que ne veulent pourtant pas les citoyenNEs, les habitantEs, les usagerEs, les consommateurs-consommatrices. Le Zélé, la Zélée applique tout ce qui détruit les populations ; il-elle pourrit les vies du plus grand nombre.

Une protestation non aboutie est un facteur positif dans le classement du ou de la ZéléE et dans sa carrière.

6. -b) Contribuer au renforcement de la thanatocratie ?..

Une protestation qui ne se donne pas les moyens d'obtenir raison fait du Zélé, un employé-modèle, un quasi-héros face à l'adversité, puisqu'aux yeux de ses hiérarchies, il aura eu su tenir tête aux opposants, qu'il ne s'est pas laissé intimider et qu'il aura eu malgré tout rempli sa mission « avec courage et abnégation » selon les directions qui le commanditent (poser un Linky, par exemple ou gazer des enfants que les services publics ont abandonnés dans la rue). Une protestation sans réelle intention d'aboutir est une simple caution, c'est le faire-valoir du zèle imbécile des larbins du pouvoir de nuire ; c'est la caution des puissances de mort... Nous vivons une guerre contre les peuples, et en appliquant les règles de nos lois scélérates et meurtrières, les zélés serviteurs, les zélées servantes ont effectivement choisi leur camp : ils et elles ne vivent plus qu'en éliminant ce qui bouge et veut vivre. Les ZéléEs sont des tueurs et des tueuses.

Et cetTE employéE zéléE (technicienNE, policierE ou juge), notéE pour sa persévérance et la réalisation des objectifs atteints, ne manquera pas, ensuite, d'animer des formations pour montrer les stratégies de persuasion qui « gagnent » face aux semblants d'oppositions.

7. Laisser nos tribunaux retirer toute leur responsabilité aux coupables et les Parquets se permettre même d'oser qualifier les mineurs de responsables (si, si ! ça existe, sans rire !)

Toutes ces affaires où des agents de l'ordre, des hommes de loi se permettent de traiter des mineurs comme s'ils étaient responsables s'accélèrent à un rythme effréné. On peut croire pour appliquer sur les populations la stratégie du choc.

De notre côté, peut-on continuer à se satisfaire seulement de quelques concessions ? À célébrer l'arrivée de nouveaux préfets qui ne sont jamais que les exécutants des basses œuvres de gouvernements de plus en plus ouvertement racistes et anti-pauvres ?

Faut-il s'illusionner sur de prétendues capacités de « révolte » (sic) quand on ne fait que se mentir à soi-même au regard des objectifs réellement atteints ?

Faut-il qu'en matière de migration, les personnes aidantes, les soutiens, les bénévoles, les humanitaires se laissent à ce point charger personnellement, et étouffer de tous les devoirs incombant pourtant à l'État seul, à ses compétences et à ses prérogatives (l'assistance, l'accueil, l'accompagnement, la nourriture, les soins, la traduction, l'hébergement, la communication, les transports, la formation, l'insertion...) ?

8. Continuer de donner crédit et confiance aux autorités les plus corrompues et perverties ?

Ou bien doit-on admettre alors que nous sommes encore très loin du compte et que nous devons continuer à nous informer, à nous organiser, à convaincre et à sensibiliser nos entourages, au travail, dans les quartiers, en famille ?... Car il y a un pas très facile à franchir entre la confiance en des pouvoirs notoirement crapuleux et l'obéissance à leur autorité.

Ce n'est pas de l'extrêmisme, ce n'est pas du jusqu'auboutisme, ce n'est pas de l'anarchie ou de va-savoir quelle philosophie révolutionnaire. Sérieusement, en toute objectivité, ce n'est qu'un simple constat : Il n'y a aucune illusion à se faire, nous ne serons jamais « dans la révolte »

– tant que nous accepterons des nuisances de la part de puissances qui ne respectent rien de ce qui est humain (du droit humain, celui qui figure dans les déclarations internationales, y compris pour les enfants),

– tant que nous nous sentirons soulagéEs de ne pas être touchéEs par les mesures les plus scélérates qui menacent ou qui touchent les populations défavorisées, et

– tant que nous nous contenterons d'éviter le pire, sans rien jamais obtenir d'effectivement JUSTE !

Jean-Jacques M’µ

(1) J'appelle zéléE “employéE” tout travailleur, privé ou public (homme ou femme, jeune ou vieux), dont la tâche est d'imposer l'inadmissible au plus grand nombre, traité comme du bétail. Est ZéléE la personne payée à nous retirer un juste droit, ou nous obliger au contraire à ce qu'on est pourtant en droit de refuser. Sont zéléEs ces quelques travailleurs-travailleuses échappéEs du chômage qui se font payer à nous retirer nos droits, qui nous interdisent ce qui est permis (qui sont l'image fidèle de l'obéissance à l'autorité, comme ces concierges qui, pour ne pas perdre leur place, refusent les distributions de tracts d'informations, par exemple, les flics, tous ces journalistes et correspondantEs locaux qui pensent nourrir leurs familles ou eux-mêmes en empoisonnant le reste du monde autour d'eux, en participant de la censure et de la propagande).

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