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Patricia Prunier : La Danse bleue (détail)

Patricia Prunier : La Danse bleue, détail central

Patricia Prunier s'est installée dans le Lot il y a une demi-douzaine d'années. Ce sont les relations des êtres avec la terre qui l'ont conduite à ce choix. Patricia Prunier est une plasticienne diplômée des Beaux-Arts de Nantes qui s'est peu à peu laissée imprégner par la nature du travail avec la substance terrestre brute, le sol, l'herbe, l'écorce, les feuilles... De sorte que, c'était inévitable, sa fréquentation au plus près du quotidien dans ce pays minéral, de grottes et de gouffres, l'a conduite à s'interroger sur elle-même devant les résistances tranquilles que les hommes d'ici savent opposer durablement aux pressions institutionnelles, aux variations de climats, à la multiplicité des chemins à travers champs, bois et rivières. Inéluctablement, elle s'est laissée porter vers les arts pariétaux qui n'ont pas tardé à finir de laisser leur empreinte en elle, au sens propre, dans sa démarche personnelle, d'artiste.

Patricia Prunier lance son geste pictural sans chercher autre chose que l'expérience directe de la couleur lancée en tous sens sur de multiples supports.

Patricia Prunier : Musique végétale

Patricia Prunier : Musique végétale

 

L'appel des sons

Quand on pénètre dans l'ancienne chapelle des Cordeliers pour voir l'exposition qu'elle y présente sous le titre « Danse la vie », le regard porte aussitôt vers la nef. Là, sous les vitraux, un monument éphémère reçoit la lumière à travers une multitude de feuilles qui balancent en se frottant silencieusement les unes aux autres. Plus près, on perçoit que cette variété joue de la proximité de ces pages de partitions colorées par la suie ou la cendre, par exemple. Cette installation de 9m carrés est composée d'empreintes, de traces de mines, d'encres, de charbon, de fusain, de pastel, où les papiers-musique se suspendent au vent léger des cordelettes qui les fixent. Ce sont autant d'œuvres fabriquées par l'alliance imprévisible des textures, des modèles et des outils de transition (de passation) du monde réel au représenté, du monde rêvé, imaginaire, à la création effective, Patricia Prunier utilise les hasards des chemins comme motif à ses variations sur les matières et les matériaux. Plongeant aux racines de l'art pauvre, ses compositions sont fondées de ce qui se trouve à sa portée, autour d'elle. C'est une sorte de journal de bord sans date, sans titre et sans mots...

Patricia Prunier : Musique végétale, détail, partition pour charbon de bois

Patricia Prunier : Musique végétale, détail, partition pour charbon de bois

 

Patricia Prunier : Musique végétale, détail aux notes sanguines

Patricia Prunier : Musique végétale, détail aux notes sanguines

 

Patricia Prunier : Musique végétale, détail, rythme de la pluie sur les feulles, avec ronds dans l'eau sur papier de soie

Patricia Prunier : Musique végétale, détail, rythme de la pluie sur les feuilles, avec ronds dans l'eau sur papier de soie

 

Patricia Prunier : Musique végétale, détail du bruit du vent sur les branches

Patricia Prunier : Musique végétale, détail du bruit du vent sur les branches

 

Danse avec la vie

La curiosité de cette artiste dépasse le simple jeu avec les formes. S'inspirant de la gestuelle des danseurs contemporains (elle aime beaucoup le travail de Trisha Brown, décédée en mars cette année), elle reprend leurs lancers, leurs jeters, leurs porters. Elle ne répugne pas à agrandir les mouvements, à rire des perspectives qu'elle aligne, au trait, au fusain, à la sanguine, à la craie, à l'encre, à la plume, avec une maîtrise consciente des effets sur la toile.

Patricia Prunier : Le Saut libérateur, ensemble

Patricia Prunier : Le Saut libérateur, ensemble

 

Patricia Prunier : Le Saut libérateur, détail

Patricia Prunier : Le Saut libérateur, détail

 

Multiples facettes d’un art subtil

Cette faculté de mélanger les styles, les genres, les matières prend de plein pied tous ceux qui parlent des passerelles entre les arts sans jamais favoriser pour autant l'interdisciplinarité. Elle s'y confronte de fait, sans discours, avec un plaisir qu'on devine proche de tous les sens, au-delà de la vue, du toucher, de l'ouïe, de l'odorat, du goût, il y a dans tous les cas du sentir vrai. Sans chichi ni tralala.

Tout fonctionne en proposition dans son travail, en force d'initiative, en ressource énergétique. Partant, on aurait tort de saisir rien de polémique chez Patricia Prunier, ni revendicatif ni provocateur. On devine la démarche : elle se lance dans l'aventure des rencontres sans penser un moment se montrer farouche, elle pointe non nez, son doigt, sa main, le bras, et elle se lance. Il y a de la chorégraphie comme trace de son passage à travers la matière, et l'audace prend chez elle le mode de l'inspiration créatrice, à mettre en présence ce qui relève d'autres mondes, d'autres lieux, d'autres temps. 

Patricia Prunier : exposition à la Chapelle des Cordeliers, Gourdon.

Patricia Prunier : exposition à la Chapelle des Cordeliers, Gourdon, mai 2017.

 

Impulsions à partir des fondamentaux

Cette audacieuse aspiration, le prouvent assez les nombreuses tentatives qu'elle présente sur les murs dorés de l'église gourdonnaise et sur son site : http://www.patriciaprunier.fr/galerie. Il y a chez cette plasticienne du relief dans les pigments, du dessin dans les couleurs, du reflet dans les aplats.

À l'entrée de son exposition, elle attire nos pas vers une spirale de bols de terre posés à même l'herbe. Ce sont les bols conçus et fabriqués dans les terres qu'elle a cuites au creux de moules qui permettent d'en conserver les couleurs, comme pour les comparer, il s'agit rien moins qu'un artefact prélevé dans les réalités des paysages qui nous entourent, et où nous vivons. Une façon de ready-mader à partir de notre capacité à aimer notre environnement.

Patricia Prunier : Terres

Patricia Prunier : Terres

 

Il y a dans l'entreprise de Patricia Prunier une capacité à dépasser le réel pour mieux s'y frotter encore, et y revenir régénéré.

Jean-Jacques M’µ

Patricia Prunier expose DANSE LA VIE tous les jours jusqu'au dimanche 21 mai 2017, de 10h à midi et de 14h à18h, à La Chapelle des Cordeliers, à Gourdon (Lot)

(photos  Sophie Leleu)

Tag(s) : #Peinture, #Patricia Prunier, #Cordeliers de Gourdon, #Arts plastiques
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